• Après avoir traversé cette expérience traumatisante, ma méfiance envers les autres s'est intensifiée. Les personnes me faisaient peur, en particulier les hommes, que je considérais tous comme des joueurs. J’étais sûre que chacun portait un masque et que personne n'était authentique. J'étais constamment sur mes gardes. Il m'a fallu beaucoup de temps pour retrouver un minimum de confiance envers les autres. En attendant, j’ai trouvé du travail dans une usine, où je gagnais beaucoup plus d'argent qu’en tant que coiffeuse. J'avais besoin d'indépendance financière, et il était hors de question de compter sur maman. L'usine était éloignée de chez moi, mais mes parents ont décidé de m'acheter une mobylette. J'avais épargné quelques francs, mais ce n'était pas suffisant. J'ai été très surpris que mon père accepte de m'aider, ce devait être l'un de ces rares jours de bonté. C'était la première fois qu'il achetait quelque chose pour moi.

    Incroyable, me voilà en usine, alors que je m'étais toujours juré de ne jamais y mettre les pieds. Mon père devait être satisfait de voir que j'acceptais enfin de travailler là-bas. Ce fut une période difficile. Devoir travailler avec des personnes méprisantes. Néanmoins, j'ai fini par m'y habituer. Je me souviens très bien de mon premier jour en usine, les filles étaient méchantes avec moi. C'est vrai, j'avais toujours pris soin de mon apparence, mais à l'usine, cela était immédiatement mal vu. J'ai été insulté de toutes les manières possibles. J'ignorais qu'il était préférable de venir négliger à l'usine, sans soin particulier. On m'avait toujours appris à être présentable où que j'aille. Les filles se moquaient de moi, et bien sûr, les garçons, c'était la drague.  Un jour, j'ai eu une prise de conscience incroyable, je me suis dit que je ne laisserais plus jamais personne me manquer de respect, ou me dire comment m'habiller, ou autre... J'ai réalisé que j'étais une adulte capable de prendre mes propres décisions, et que je ne craignais plus le regard des autres. Quelques mois plus tard, on m'a transférée à une autre chaîne de production, ce qui était une véritable bouffée d'air frais pour moi, car

    effectuer le même mouvement en boucle devenait épuisant. Sur cette nouvelle chaîne, un garçon adorable était responsable de retirer les cartons pleins, malgré une légère boiterie. Il me souriait chaque fois qu'il passait devant moi. J'ai découvert par la suite que sa maman travaillait également à cette chaîne, elle était d'une grande gentillesse. Après plusieurs mois, il a enfin trouvé le courage de me proposer de sortir prendre un verre après le travail, et j'ai accepté avec joie. Nous avons longuement discuté.  Il m'a révélé la raison de sa boiterie : un grave accident de moto qui l'a laissé hospitaliser pendant plus d'un an. Il a donc failli perdre la jambe. Depuis cet événement, il a remarqué que les filles ne le regardaient plus de la même manière. Je pouvais sentir sa tristesse et sa souffrance. Cependant, cela n'avait aucune importance pour moi. J'ai choisi d'être son amie parce que je savais qu'il était une bonne personne au bon cœur, et je ne me suis pas trompé. Il ne pouvait pas se passer de la moto, donc il en a racheter une.  C'est avec lui que j'ai appris à conduire une moto, et j'ai adoré. Notre aventure en Italie a été incroyable, avec notre séjour en camping qui ne manquait pas d'action. La voiture de sport, décapotable orange qu'il conduisait, attirait tous les regards. Sa maman a rapidement développé une forte sympathie envers moi, m'invitant régulièrement chez eux, pour des moments de partage et de discussion. Elle savait que je savais écouter.  Cependant, sa santé s'est détériorée. Elle a dû être hospitalisée pour des problèmes de vésicule biliaire, une opération qui aurait dû être sans danger, mais elle a succombé à une embolie pulmonaire. J'ai décidé de rester à ses côtés pour le soutenir, durant cette difficile épreuve de la perte d'une mère. Son frère a également fait tout son possible pour le réconforter. Après un an, j'ai choisi de m'en aller. Je sais que cela a brisé son cœur. Je pensais que c'était la meilleure décision à prendre. Je voulais qu'il puisse enfin trouver le bonheur qu'il méritait. En restant à ses côtés, il n'aurait jamais été en mesure de rencontrer la personne, qui lui offrirait le véritable amour. Je sais qu'il avait de forts sentiments pour moi, son regard

    en disait long. Il aurait été prêt à tout pour moi. Moi aussi, je l’aimais énormément, mais juste en tant qu’ami. J'ai donc décidé de m'éloigner, afin qu'il puisse, lui aussi, trouver un nouveau chemin vers le bonheur.

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